Quelle place pour les influenceurs en matière de communication « alcool » ?

L’influence commerciale a suscité de nombreux débats. L’ARPP avait, de façon précurseur dans la version de 2017 de sa Recommandation dénommée « Communication publicitaire digitale » (actuellement désignée dans sa 5ème version Recommandation « Communication publicitaire numérique »), défini la notion d’influenceur et les critères pour qualifier une collaboration commerciale entre une marque et un créateur de contenu. L’objectif poursuivi reposait principalement sur le principe de transparence, afin d’assurer le respect d’une communication publicitaire loyale et véridique.

Face au développement des contenus sur les réseaux sociaux mettant en scène notamment des circonstances de consommation ou de valorisation de boissons alcooliques soutenues par des influenceurs « lifestyle » voire par des artistes, les juridictions ont eu à examiner ces contenus.

Revenons sur la décision la plus notable prononcée le 5 janvier 2023 du Tribunal Judiciaire de Paris statuant au fond sur des publications diffusées sur un réseau social de droit irlandais. Dans son jugement, le Tribunal a examiné une série de posts associant des marques d’alcool à des moments festifs, d’évasion, de séduction, de détente familiale, de vie quotidienne. Le Tribunal s’est déclaré compétent territorialement en relevant que les publications étaient émises en français et visibles depuis la France. Il a en outre motivé sa décision en détaillant pour chaque compte le nombre d’abonnés, dont on peut relever que ce chiffre était assez variable et compris entre 9000 et 450 000 abonnés. Le jugement a précisé que ces contenus étaient illicites en ce qu’ils visaient à utiliser la notoriété des titulaires des comptes « aux fins de faire la publicité pour des boissons alcooliques » et qu’ils incitaient à une « consommation excessive d’alcool ». Le jugement a donc prononcé le retrait des publications et a ordonné auprès de la plateforme concernée la communication de l’identification des différents comptes litigieux.

Soulignons que le Tribunal n’a pas analysé si les contenus des influenceurs relevaient ou non d’une collaboration commerciale, mais a qualifié ces derniers de « publicités illicites ». Cette décision incite dès lors à ce que les posts accessibles et destinés au public français soient conformes aux mentions autorisées définies par l’Article L. 3323-4 du code de la Santé publique.

Par ailleurs, outre cette décision, la Loi n° 2023.451 du 9 juin 2023 visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux a donné une définition de l’influence commerciale en son article 1 :  « Les personnes physiques ou morales qui, à titre onéreux, mobilisent leur notoriété auprès de leur audience pour communiquer au public, par voie électronique, des contenus visant à faire la promotion, directement ou indirectement, de biens, de services ou d’une cause quelconque exercent l’activité d’influence commerciale par voie électronique ». Elle a aussi précisé en son article 5 que les contenus faisant la promotion de biens ou services ou causes à l’initiative des personnes visées à l’article 1 devront afficher la mention « Publicité » ou la mention « collaboration commerciale » durant l’intégralité de la promotion, sur l’image ou la vidéo, de manière claire et lisible. Ce texte a rappelé de façon assez laconique que les dispositions relatives aux publicités pour les boissons alcooliques (Articles L. 3323-2 à 3323-4 du code de la Santé publique) s’appliquent. Par conséquent, aucune interdiction ne vise le secteur alcool, ce qui permet aux annonceurs et influenceurs de s’appuyer sur la doctrine de l’ARPP dans sa Recommandation « Alcool » (cf. notre article relatif aux barmen). Son point 3.1.1 permet donc de recourir aux professionnels disposant d’une fonction professionnelle effective, passée ou présente, exercée dans l’élaboration, la distribution ou la présentation du produit. L’ARPP reste ainsi à la disposition de ses adhérents pour les assister dans le cadre de leurs dispositifs d’influence commerciale et les aider à sécuriser leur choix de créateurs de contenus et de discours.

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